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Ces bateaux qui dérangent


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Normand Provencher Le Soleil

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Le Québec compte quelque 500 000 lacs qui couvrent 12 % de sa superficie. La plupart se trouvent dans des régions difficiles d’accès et demeurent protégés des activités humaines. À l’inverse, les fragiles écosystèmes de ceux situés près des zones urbaines sont soumis à des pressions de plus en plus fortes, surtout depuis l’engouement du retour à la nature provoqué par la pandémie. Dans une série de trois reportages, Le Soleil s’attarde à ces dangers et nuisances. Aujourd’hui, le trafic de plus en plus dérangeant sur les lacs.

Les riverains du lac Blanc se souviennent avec nostalgie de l’époque où s’aventurer sur les flots bleus de l’été se voulait une partie de plaisir. C’est moins le cas depuis que les restrictions de voyages et le télétravail découlant de la crise sanitaire ont poussé les gens à prendre d’assaut les lacs à bord d’embarcations motorisées de toutes sortes et de plus en plus puissantes.

«L’été dernier, des riverains se sont privés de sortir, certaines fins de semaine, pour faire leur promenade habituelle parce qu’ils trouvaient ça trop dangereux et trop risqué», déplore France Saint-Germain, présidente de l’Association des riverains du lac Blanc, situé à Saint-Ubalde, dans la région de Portneuf.

Le cas du lac Blanc est loin d’être isolé. Plusieurs intervenants interviewés dans le cadre de ce reportage dénoncent haut et fort une invasion des lacs par des propriétaires d’embarcation peu scrupuleux des mesures environnementales et de sécurité.

De plus en plus, c’est «le Far West» sur certains lacs, explique-t-on. Certaines fins de semaine ensoleillées, la cohabitation est de plus en plus difficile entre bateaux à moteur, motomarines, pontons, canots, kayaks, voiliers, paddle boards et pédalos. Sans oublier les baigneurs.

«Quelqu’un du lac Brompton, en Estrie, me racontait qu’il y a tellement de bateaux sur le lac, le samedi, que lui, un résident de longue date, n’avait plus aucun plaisir à sortir avec son petit ponton. Ça pue, il y a trop de bruit, trop de vagues. Il préfère attendre au dimanche, après 18h», mentionne le biologiste et avocat spécialisé en droit de l’environnement et en droit municipal, Jean-François Girard.

Un destructeur de lacs

La popularité des wake boats, ces puissantes embarcations lestées à l’arrière afin de créer une vague permettant de pratiquer le surf, est vivement dénoncée. «C’est un destructeur de lacs total. C’est la machine que tu ne veux pas voir là, sauf que c’est rendu la norme», dénonce haut et fort Daniel Piché, président de la Coalition pour une navigation responsable et durable.

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La vague provoquée par ces engins provoque une érosion importante des rives, en plus de brasser les sédiments au fond du lac, ce qui facilite la propagation des plantes aquatiques indésirables comme le myriophylle à épis et les algues bleues. De l’avis de plusieurs spécialistes, les wake boats ne devraient être autorisés à circuler que sur les lacs ayant une profondeur minimale de cinq mètres, à plus de 300 mètres de la rive, ce qui est loin d’être la norme.

«Quand tu veux faire du ski alpin, tu ne fais pas ça dans la rue, tu vas sur une côte. Les gens qui font du surf en arrière d’un wake boat, ils font une vague pour faire comme à Hawaï, c’est ça le problème», tonne Daniel Piché, ajoutant que certains lacs américains sont allés jusqu’à bannir l’usage de ces embarcations.

Au lac des Sables, dans les Laurentides, M. Piché est aux premières loges pour assister à l’augmentation du trafic. «Le lac peut accueillir 27 bateaux sans trop faire de dégâts. Certaines belles fins de semaine, on peut en voir jusqu’à 200. En temps normal, on vendait 600 vignettes par été, toutes embarcations confondues. L’an passé, on est passé à 675 d’une shot. Il y a des gens qui ont sept ou huit embarcations, c’est hallucinant.

«Il y a des îlots sur notre lac qui ont disparu depuis dix ans, enchaîne-t-il. Ne reste qu’un rocher. Ce n’est pas une vue de l’esprit de dire que les wake boats détruisent les lacs.»

Patrouille nautique

«Ce qu’on s’aperçoit avec la COVID, c’est qu’il y a une augmentation du nombre d’embarcations sur tous les lacs au Québec, déplore le maire de Lac-Sergent, Yves Bédard. En 2019, la municipalité avait 185 bateaux enregistrés. Cet été, on s’enligne pour 260. C’est devenu un problème.»

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Pour rassurer les riverains et tenter d’instaurer un semblant d’ordre, la municipalité a mis sur pied une patrouille nautique qui est entrée en fonction à la fête de la Saint-Jean. L’escouade, affectée également au lac Sept-Îles, est habilitée à distribuer des contraventions par Transports Canada et par la Direction des poursuites criminelles et pénales (DPCP). «Juste le fait d’être présent, ça va tranquilliser le monde», croit M. Bédard.

Les riverains du lac Blanc, eux, aimeraient bien que la patrouille nautique de la Sûreté du Québec soit présente davantage sur leur plan d’eau, et pas seulement une fois par année, «le jeudi après-midi, alors qu’il n’y a pas de monde sur le lac», explique France Saint-Germain.

«On a l’impression qu’ils considèrent le lac Blanc comme le petit lac peu achalandé d’il y a 20 ans. On a pas loin de 190 embarcations motorisées à circuler, incluant celles de la marina du camping, sans compter les embarcations non motorisées. J’ai l’impression que ça augmente chaque année. Ça fait beaucoup pour un petit lac de deux kilomètres carrés», avoue-t-elle.

Pour contrer l’érosion des berges causées par le passage des embarcations à haute vitesse, l’association a installé, comme c’est le cas sur beaucoup de lacs, des bouées afin d’inciter les gens à diminuer leur vitesse à proximité de la rive. «On voit déjà de petits changements de comportement dans la navigation», observe Mme Saint-Germain.

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Le bon bateau sur le bon lac

La scientifique Sonja Behmel adhère entièrement aux principes de la navigation durable. Pour elle, «le bon bateau» doit naviguer «au bon endroit».

Quand elle a fait l’acquisition d’un chalet sur le bord du lac Perreault, dans Portneuf, la pdg et cofondatrice de WaterShed Monitoring n’a pas aimé ce qu’elle a vu. «Les gens pratiquaient du ski nautique, des motomarines tournaient en rond toute la journée. Il n’y a aucun plaisir à faire de la vitesse ici, c’est un tout petit lac.»

Mme Behmel, en collaboration avec d’autres riverains en quête de tranquillité et de respect de l’environnement comme elle, a pris le taureau par les cornes. Un mouvement «anti-vitesse à moteur» a été lancé. Les récalcitrants étaient poliment invités à modérer leurs ardeurs. Lorsqu’un chalet était mis en vente, des pressions étaient même exercées auprès du courtier pour retirer la mention «lac navigable» dans ses promotions.

«À chaque fois qu’un nouveau propriétaire arrivait, on lui expliquait les principes de la navigation durable et ce qui était socialement admis. Un bateau à moteur, oui, mais à condition d’être tranquille. Ceux qui ne voulaient pas se conformer ont fini par vendre leur chalet pour aller ailleurs.»

Évidemment, Mme Behmel ne s’est pas fait que des amis parmi la soixantaine de riverains. «Disons qu’il y a eu des étés pas très agréables pour moi ici. Je savais qu’il y avait des gens qui voulaient juste m’étrangler, lance-t-elle en riant. Je n’ai pas lâché le morceau et aujourd’hui les gens me remercient. Maintenant, les seuls qui tournent en rond, ce sont les propriétaires de pontons qui le font à très, très basse vitesse, sans faire de vagues.»

Pour une paix sociale

Tout ce qui concerne la navigation sur les lacs relève de la compétence exclusive d’Ottawa. Les municipalités ne peuvent adopter quelque règlement que ce soit. Or, malgré les plaintes qui s’accumulent face à la prolifération des embarcations de toutes sortes, «personne ne semble s’y intéresser de façon sérieuse au sein du gouvernement fédéral», déplore Me Jean-François Girard. «L’inefficacité de la procédure fédérale a fait la part belle aux amateurs de bateaux et à l’absence d’entrave à leur circulation, avec les conséquences que l’on connaît.»

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C’est la croix et la bannière pour les associations de riverains qui cherchent à encadrer un tant soit peu le trafic sur les lacs, déplore-t-il. Elles doivent s’attendre à «passer à travers le labyrinthe inextricable de procédures» et à engloutir des sommes importantes. «C’est tellement compliqué. Je dis aux municipalités de ne pas perdre leur temps, ça ne marche pas.»

Selon le juriste, le gouvernement fédéral devrait, «avant de permettre n’importe quoi sur n’importe quel lac, imposer des normes nationales basées sur la science» afin d’établir la capacité de chaque plan à accueillir certains types d’embarcations, et laisser ensuite plus de marge de manœuvre aux collectivités locales.

«J’ai toujours dit, poursuit Me Girard, que si on veut instaurer une sorte de paix sociale sur nos lacs, il faut pouvoir les “taguer”. Vous aimez ça les bateaux à moteur? OK, allez vous amuser sur ce lac-là, pas sur celui-là.» Rien n’empêche non plus la signature d’un «contrat social» entre riverains pour encadrer le nombre de bateaux. «Le problème, c’est de convaincre tout le monde. Il ne faut pas en avoir un qui ne veut pas marcher au pas et qui t’envoie promener...»

 

[1 de 3] Dans une série de trois reportages, Le Soleil s’attarde à ces dangers et nuisances. Aujourd’hui, le trafic de plus en plus dérangeant sur les lacs. Demain, la guerre au myriophylle à épis. Lundi, des fosses septiques problématiques.

https://www.lenouvelliste.ca/actualites/le-fil-groupe-capitales-medias/ces-bateaux-qui-derangent-c18b51d5cde1640dd670689ae2993e81

 

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Lisant  tout ceci en 2 fois, et me placant dans la peau de ces riverains,

en faisant abstraction a mon expérience de navigateur/pêcheur ,  je

serais porté a leur donner raison, mais non carte blanche

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Et selon moi, il faut bien encadrer les pouvoirs qu,auraient ces pseudos patrouilles nautiques, spécifiques a ces lacs, comme nous voyons dans l'article.

Le fait de leur donner des pouvois pour intercepter une embarcation, et de donner une contravention, peu amener a l'abus de la part de certains tripeux le LOUWA.

Une simple contestation et gain devant un tribunal, ferait jurisprudence, et les rameneraient a la case image.png.cd3be6c9f0aae490421544669fa9d6f2.png

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Au lac Louisa dans les basses Laurentides l'accès est réservé au riverains. Ils veulent protéger leur lac. Trois bateaux sur cinq  qui s'y promènent sont des wakeboats. À peu près tous les quais sont munis de fouets d'amarrage pour tenir les bateaux à distance du quai pour éviter qu'il ne s'abime à cause des vagues causées par les wakeux. Imaginez les berges. Trouvez l'erreur. 

Modifié par x-rap
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L'ennemi numéro un restera toujours les riverains. Ils sont là à l'année. La grosse descente privé pour le râteau à pitounes alors que le touriste en arrache pour mettre à l'eau ça 14pieds.

J'ai hâte de lire l'article sur les fosses septiques. C'est bien beau les constructions conçues pour les vacances, mais utilisé à l'année et RBNB quand il y a disponibilité. L'herbicide et la belle pelouse. J'aimerais tant pouvoir mettre à l'eau au lac Sergent, au moins, pour me consoler le lac est mourant.

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Il y a 8 heures, Le Protecteur a dit :

Lisant  tout ceci en 2 fois, et me placant dans la peau de ces riverains,

en faisant abstraction a mon expérience de navigateur/pêcheur ,  je

serais porté a leur donner raison, mais non carte blanche

La maison familiale de mes parents était sur le bord du richelieu…

je peux comprendre les riverains de plans d’eau prit d’assault par les plaisanciers de fds de trouver la situation pas très agréable.

j’ai vécu 20 ans la bas et j’ai continuer de visiter mes parents un autre 20 ans… 

ça tellement changer, je me souviens que jeune, on se promenait en chaloupe les weekend sans avoir peur de chavirer…

Quand mon père a acheter son cruiser en 89, ça commençait à être peupler un peu mais jamais comme aujourd’hui…

Moi même j’y vais jamais la fds avec mon bateau, c’est trop fou…rajoute à ça les marinas qui loue des paddles board et des kayaks…pas mêlant c’est du suicide.

J’ai vu des gens avec des enfants en paddle board au beau milieu de la riviere, sous le pont de la 20, avec le bateau de croisière qui approche qui n’a pas trop le choix de passer là, avec des bateaux qui passent de tous les bords sans ralentir à la marina…debile ben raide.

 

Des accidents il y en a déjà eu et il va en avoir d’autres, il va se passer de quoi de grave bientôt si ça change pas.
 

Pour revenir à la maison de mes parents, aucune quiétude la fds, se faire réveiller par des speed boat qui passe au fond au beau milieu de la nuit…pas capable d’avoir une discussion dehors sans crier, voir des gens s’ancrer à 20 pied de la berge derrière chez vous pour faire le party pis jouer la musique dans le tapis…c’est pas le fun, mais….MAIS, ça dure 2 mois…donc on a jamais chialer et on comprenait la situation même si c’est chiant…

Maintenant, ceux qui ont acheter la maison de mes parents, ont un beau wakeboat de 100k accrocher au quai…

 

Cette année je me demandais où je prenais ma passe de mise à l’eau…l’an passé, st Basile le grand, 175$ et je m’en suis servit juste une fois…sinon j’allais à st Paul de l’île aux noix pour 10$ la shot…cette année je veux faire plus de fleuve, donc je vais prendre ma passe à Varennes…la passe du lundi au jeudi, 300$…je laisse la place au deplaisanciers la fds.

sinon vale perkins sur le memphré, je vis l’autre côté de la médaille la bas vu que je suis résident à cause du rachat du chalet de mes parents à mansonville, ça me coûte rien et j’ai des places de parking réservé…et bien honnêtement, je vais pas chialer contre ça!

 

 

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